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La cuisine des mots ribonds
31 décembre 2011

Meurtres pour rédemption - Karine Giébel

Ce roman, c'est du lourd. Au sens propre, 767 pages, 900 grammes, comme au sens figuré et avec une telle écriture, il ne s'agit plus de polar mais bel et bien de littérature. Un roman magistral qui ne laisse pas indemne le lecteur, une plongée en apnée dans les abysses de l'âme humaine.

Sans aucun discours moralisateur ou politique, l'auteur nous fait entrer dans l'univers ignoble des prisons françaises. Certains regretteront des clichés en pagaille : les matons sadiques, les gentils, les moutons, ceux qui abusent de leur fonction ou de leur force physique, etc. Pour ma part, je pense qu'ils illustrent efficacement la réalité de la prison, son manichéisme.

Mariane est jeune, très jeune, et elle passera le reste de sa vie, longue, très longue, derrière les barreaux, on souffre avec elle dans la brutalité étouffante de la prison. Karine Giébel réussit à nous la rendre attachante tout en gardant une certaine distance car, on ne l'oublie jamais, Mariane n'est pas là par erreur ; il y a cinquante ans, elle aurait fini sous la guillotine.

Talent de l'auteur, aucun ennui dans ces centaines de pages qui racontent l'enfermement, la longueur des journées, le vide de l'existence et, en total contraste, les explosions de violence. Heureusement, de ci, de là, quelques touches d'humour et d'humanité viennent ponctuer le récit de ce monde si noir.

Quand Mariane réussit à s'enfuir, on éprouve un réel soulagement pour elle mais l'enthousiasme est vraiment de courte durée car, dehors, c'est encore pire. Il paraît que nous sommes en démocratie. Sauf que le pouvoir corrompt et là, franchement, Karine Giébel nous enfonce la tête dans un torrent d'ignominie. A chaque épisode de l'histoire, on croit avoir touché le fond et non, le pire est à venir. Surtout que toute cette affaire est totalement crédible et pourrait, hélas, exister. Quelle horreur !

Pourtant, et c'est un tour de force dans un tel contexte, ce roman virtuose offre quelque raison d'espérer, un instant ou deux de pure amitié ou même d'amour. Le monde et l'Homme sont abjects mais ... carpe diem. Oui, je n'oubierai pas cette minuscule pépite positive au milieu de ce choc émotionnel où nous précipite Karine Giébel, un grand, très grand écrivain.

meutres_pour_redemption

Meurtres pour rédemption - Karine Giébel
(2010 - Fleuve noir - 767p)

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