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La cuisine des mots ribonds
29 décembre 2011

L'école des dingues - Cornelia Read

Après Champs d'ombre, c'est avec un réel plaisir que je retrouve cette chère Madeline, surtout que Cornelia Read s'est totalement renouvelée dans cette deuxième aventure. Quittant ses histoires de famille, Madeline a abandonné la morne Syracuse pour le Massachusetts et son boulot de journaliste pour devenir prof d'histoire.

N'ayant pas lu la quatrième de couverture (et c'est tant mieux puisqu'on y dévoile ce qui se passe à la moitié du roman, pfff...), j'imaginais que le titre était une métaphore. Que nenni ! L'auteur nous raconte une véritable école de frappadingues, élèves et profs compris sans oublier le directeur qui se prend pour un gourou. Et, ma foi, Madeline y trouve sa place.

En fait, L'école des dingues m'a rappelé La mort des bois de Brigitte Aubert (pas La mort des neiges qui se termine en grand n'importe quoi) ou les premiers Fred Vargas avec ces trois étudiants en histoire. A dire vrai, ces romans ne se ressemblent pas mais ils ont en commun des personnages principaux décalés et spontanés qui jouent au détective avec la même fraîcheur.

Cornelia Read a gardé son écriture rythmée et ses dialogues plein d'humour. J'apprécie toujours autant ses portraits vivants et mordants, particulièrement ceux des psy qui aiguisent son esprit critique et pourtant jamais sentencieux. Même si on peut regretter un dénouement encore une fois un peu vite cuisiné, l'intrigue est amenée de manière particulière mais efficace.

Bref, j'ai encore passé un bon moment avec l'insolite Madeline et j'attends avec impatience le moment où j'ouvrirai L'enfant invisible.

l-ecole-des-dingues

L'école des dingues - Cornelia Read
( 2009 - Actes Sud actes noirs - 299p)

Page 127 :

 "- T'as jamais l'impression que les trucs des sixties pourraient revenir ? demanda Forchetti.
Il avait l'air prêt à tout donner pour que je réponde oui.
 - Parfois, je crois discerner comme une vague lueur à l'horizon. Mais ça ne dure jamais.
J'inclinai ma chaise en arrière.
 - Vous vous rappelez la photo du type tout seul debout devant un tank sur la place Tianan men ?
Wiesner et Sitzman hochèrent la tête. Forchetti se contenta de croiser les bras.
 - Je me rappelle la première fois que je l'ai vue. J'ai eu l'impression de comprendre parfaitement : ce garçon n'avait qu'à rester là, c'était tellement évident que toutes ces conneries devaient s'arrêter, et puis il n'était pas tout seul. Même les soldats dans le tank le savaient, donc il n'avait aucune raison d'avoir peur qu'on l'écrase. C'est la photo la plus triste que j'ai jamais vue.
Je baissai les yeux sur mon bureau.
 - Pourquoi ? demanda Wiesner. Le tank ne l'a pas écrasé. Le type avait raison.
 - Oui, mais il se trompait pour tout le reste, parce que toutes ces conneries ne s'arrêtent jamais. Il ne l'avait pas encore compris, mais moi je savais ce qu'il ressentirait le jour où il comprendrait."

C'est exactement ce que j'ai ressenti en regardant le procès des Ceausescu à la télévision, en 1989. Au début, j'étais heureuse de voir ainsi la fin d'une tyrannie. Ensuite, au fur et à mesure des images, j'ai pris conscience de la mascarade judiciaire et j'ai compris que la Roumanie n'était pas franchement sauvée. Madeline a hélas raison, il est des conneries qui ne s'arrêtent jamais.

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